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16 juillet 2010

Dear pretty-muffin

« A regarder de près, un rêve n'est pas chose sans danger. C'est comme un pistolet à double détente. S'il vit assez longtemps, il finit par blesser quelqu'un. »
William Faulkner, Une odeur de verveine

Longtemps je me souvenais de ces instants qui n'existent pas encore comme le futur inévitable prédit par l'oracle que je consultais tous les soirs quand minuit sonnait. Le temps continuait de passer pendant que le vide ne cessait plus d'inonder ma vie. Je me raccrochais alors à ma mémoire qui, plutôt que de se rappeler, préférait toujours réinventer ce passé obscur, brouillon et maussade mais également un avenir lumineux, limpide et heureux. Je ne suis pas autre, le temps m'effraie lorsqu'il m'éloigne et me dévie des sourires que je pose sur vos figures, lorsqu'il me transforme devant le miroir et métamorphose le bon en une chose visqueuse ... ; d'ailleurs ne serait-ce pas cela, la décomposition ?
Alors, plusieurs fois, j'ai marché dans la rue, dans cette ville que je connais sur le bout des doigts pour y avoir tout connu et tout appris. Je me suis posé sur le visage un air pressé, j'ai dissimulé l'errance derrière un simulacre de rendez-vous urgent. J'ai tourné en rond, en regardant discrètement à droite à gauche. Je te cherchais, te guettais, jouais à deviner les endroits où tu pouvais te trouver. Je tentais de me réconcilier avec l'intuition, osais les paris avec le destin, insultais Dieu parce qu'Il ne cédait pas à mes caprices. Tu devenais mon habitude, celle qui me promenait dans des détours sans fin. Et puis je finissais toujours par croiser celles qui me ramènent à l'inexistence de ma vie lorsque la leur se construit dans leur poussette, à la sortie des écoles, à leur absence de maquillage et leur code vestimentaire, mais surtout dans le regard méprisant de celles appartenant à cette secte dont tu ne fais pas partie. C'est ainsi que je fuis, la tête baissée, les larmes qui refusent de couler et sans m'être cognée sur ton torse famélique.
Je ne rêve pas mieux qu'une enfant. J'y ajoute par moments des drames lorsque mon expérience me rappelle qu'il n'y a pas de réalité sans drames, car le malheur construit la vie, lui en donne presque son sens. Et je garde un espoir infaillible qui me détruit peu à peu. Les autres y voient de l'obstination stupide et puérile. Pour moi, ce n'est rien de plus que le seul moyen de ne pas sombrer. Il n'y a plus de leçons à me donner. J'ai trop appris des illusions sanglotantes. Ce qui n'est pas encore né ne peut pas mourir.
Bien que la ville ne soit pas assez grande pour t'y perdre, je ne sais plus où chercher, je ne sais plus qu'attendre, assise sur le bord du trottoir, vomissant parfois les restes du mort-né. Où es-tu ? Maintenant neuf mois que je t'aime. Qu'est-ce tu fous ?


Bande-son : The Other Side - Yodelice
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