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1 février 2010

Quelques larmes

Mes yeux pleurent, seuls depuis deux semaines. Le froid ou le vent, je ne sais pas. Mes paupières sont lourdes d'une eau si salée qu'elles semblent se noyer dans la mer et boire la tasse jusqu'à ce que le globe soit inondé dans le flou de l'immersion. Ces grosses larmes roulent lentement le long de mes joues, vides de tristesse, de colère ou de n'importe quel sentiment qui devrait leur donner une saveur. J'ai mal à la tête. J'ai le cœur rempli de tristesse et de colère. Mais ces larmes qui s'écrasent à chacun de mes pas ne reflètent rien et ne cachent que des yeux creux, déserts et peut-être même abrutis. J'ai l'esprit ailleurs, qui vagabonde d'une pensée à une autre. Chacune aussi désagréable et blessante que celle qui la suivra. Je le sais. J'en ai des raisons de pleurer et j'entre doucement dans un engrenage infernal. Pourtant rien ne paraît sur mon visage, des problèmes et des soucis que je ne crie pas au monde et, du coup, on ne me pardonne pas, ces faiblesses qui se succèdent, ces absences qui s'enchaînent. Ils peuvent bien me regarder, je sens mon regard à l'air triste, méchant ou impoli. Ils me parlent, s'approchent. J'avais toujours cru que l'humain éviter les gens à problèmes. Croient-ils à un caprice, une mauvaise humeur, une attitude habituelle ? Sentent-ils que ces pleurs ne représentent rien ? En surface, c'est vrai, mais l'humain peut-il percevoir plus loin. Parce que cette douleur qui me ronge ne vient d'éclater alors qu'elle existait depuis des années. Une hibernation de dix ans, une révélation brutale et mes yeux pleurent des larmes qui semblent étrangères à tout ce mal. Je peux encore sourire sans faire semblant, je peux encore toucher sans trembler, je peux encore parler sans sangloter. La blessure qui saigne mais ne pleure pas s'évapore au fil du temps. J'ai beau y penser, la regarder, elle ne me fera pas pleurer, je n'ai qu'un goût, celui du vomi qui remonte dans la bouche. Alors mes larmes chastes me troublent par leur futilité. Lorsque la nuit tombe et que le silence s'effondre, je pense qu'il faut pleurer. Rêver, s'évader vers ce monde imaginé, des histoires inventées, j'en ai des milliers, des jolies, féeriques, j'opte bien sûr pour le drame, le sang et la mort. Je prie pour débloquer ses glandes lacrymales, qu'elles lâchent des flots de chagrin. Mais rien ne vient. Ces films devant lesquels je pleure pour un rien, ces histoires d'une beauté romantique et fatale m'échappent et ces chansons d'une tristesse pathétique défilent dans le mutisme. Il n'y a plus aucun sentiment qui me traverse, qui me menace ou qui me transporte. Je suis devenue un néant qui pleure des larmes grasses et grosses, et qui ne sais plus ce que c'est que d'avoir la gorge serrée, la boule au ventre et les mots hachés. Maintenant que je sais, maintenant que tout est clair, pourquoi pleurer. C'est l'espoir qui m'a abandonnée.

Bande-son : Sister Midnight - David Bowie
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