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28 septembre 2010

Can you smile

« Au fond l'homme se distinguait de l'animal par une impatience de la mort. »
Éric-Emmanuel Schmitt, La Part de l'autre

Tous ces gens croisés ont dû sentir la tristesse qui se reflétait sur mon visage. Mes pommettes rougies des larmes versées, gonflées de l'eau salée en cascade. Je sentais mes yeux trahir une matinée à pleurer. J'ai longtemps marché en aveugle. Sans me préoccuper de la vie qui continuait. Morte à l'intérieur, c'est comme ça que je me sentais quand ils sont venus me tenir la porte, me laisser traverser en dehors des passages piétons, me céder leur place, me proposer de prendre un verre. J'ai attrapé leurs sourires parce qu'ils étaient là. Comme un remède miracle au mal qui me faisait tomber. Ils étaient plus nombreux qu'à l'habitude, je n'ai pas à en douter. Une immersion vers un monde qui me semblait illusoire. Tout n'était plus que gentillesse, d'êtres qui savent vivre ensemble, s'aider, s'aimer, ne rien demander de plus qu'un sourire en retour. Ne pas oublier que sourire, c'est vers le haut. Vers le haut, et emmène tout le reste vers le haut, comme si la vie pendait de chaque côté des lèvres. Ont-ils vraiment remarquer la détresse qui explosait à l'intérieur. Est-ce un air de sympathie qui dansait dans mon oxygène. Toute cette beauté d'âme, je l'ai vécue avec des inconnus, dans un lieu étranger. Chez moi, c'est la guerre, toujours et pour toujours, où je dois me retrancher comme un lapin dans son terrier, je ne cherche plus à y exister, j'attends qu'on m'oublie, j'attends qu'on me laisse, j'attends pour me retrouver, pour me souvenir de qui je suis. Et en attendant, je m'efface, je me masque, me maquille, me cache. Jusqu'à m'oublier. Alors, les yeux bouffis qui regardent ces gens qui m'ont entourée, que je ne connais pas, ils m'ont apporté plus que tous ceux que je suis censée aimer, tous ces "proches", ces "amis", ces trucs à sang chaud qui comblent une vie, qui dissimulent la solitude, seule vraie compagne fidèle que tous fuient. J'aurais pu dévier ma vision, la rendre plus claire, plus aimable. Ce n'est pas le commun des mortels qui a forgé mon opinion sur l'espèce humaine. Je hais ceux que j'aime. Ce sont les seuls qui sont source de déception. Les autres, je m'en balance. La compassion qui flottait dans l'air quand mon cœur se déchirait en mille morceaux m'a foutu le moral au plus bas. Parce que ce sont ces autres qui me donnent plus que ce que je mérite. Petite ingrate de merde que je suis, eux s'en balancent du mépris que j'ai pour eux, ils me sourient et j'aime ça. Une contradiction supplémentaire et j'entame une énième crise à faire n'importe quoi. Peu m'importe d'où elle vient, une main tendue, je l'attrape. Et je me mets à suivre un inconnu croisé au coin d'une rue, me risquer aux intentions cachées. Je n'ai rien à perdre. Je suis qui veut bien m'emmener avec lui.


Bande-son : The Dark is Rising - Mercury Rev
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